Comment vivez-vous cette période ? Qu'est-ce qui a changé pour vous ? 

Valerie Batteux, psychologue Charmille-Marelle-Turquoise

« Ce qu’on confie pendant le confinement », tel est le titre du recueil de messages laissés par les enfants et les professionnels sur ce moment inédit.

Notre bouche masquée est actuellement le lieu d’expression de mots qui hier encore étaient si lointain, parfois même inconnu de notre langage quotidien.

Combien de fois aujourd’hui ai-je prononcé les mots : confinement, pandémie, COVID, épidémie, virus, corona, masque, gants, gel hydro alcoolique ?

Combien de fois les enfants les ont-ils entendus ? Quelles représentations mettent-ils derrière ces mots ? Quels effets ceux-ci ont–ils sur eux ? Sur nous ?

En cette période troublée, seuls les mots, dessins et créations d’enfants… Toutes expressions imaginaires de l’enfance peuvent témoigner de ce réel inattendu, et de l’espoir qu’il peut faire naitre pour l’avenir de notre humanité.

Le dessin est un très bon moyen pour exprimer ses ressentis durant cette période.

Voici " la salade de bisous" d'Éléonore

Christel, Maîtresse de maison à la Maison d’Enfants La Charmille :

« Malgré les événements, je trouve les enfants tranquilles. Même vis-à-vis de ce virus, entre des collègues stressés et la boule au ventre, on s'adapte et cela se passe très bien également. C’est le cas aussi pour nos nouvelles recrues (CDD & bénévoles) qui se sont très bien adaptées à tout cela. On y croit : tous ensemble, nous vaincrons ce virus !!! »

Lors de la mise en place du confinement, l’activité du service Turquoise s’est, dans un premier temps, ré orientée sur du soutien essentiellement téléphonique. Trois professionnelles assurent ainsi une astreinte et garantissent une écoute, un échange, un lien avec les familles.

Au fil des jours et au regard des fragilités, des tensions exacerbées par ce contexte d’isolement, « d’enfermement » et du besoin ressenti et exprimé par les familles, une unité dédiée à l’accueil d’enfants relevant du service Turquoise s’est ouverte.

5 jeunes sont donc accueillis par session de 14 jours (contexte oblige). 6 professionnels de l’équipe accompagnent ces enfants, ainsi qu’une maîtresse de maison et une surveillante de nuit. L’objectif de cette unité est de proposer une soupape, d’apaiser le climat familial, de vivre pour les enfants un ailleurs, à plusieurs, de rompre avec leur quotidien si singulier actuellement.

Cette prise en charge est possible grâce à la générosité de la communauté des Servantes de Marie de Sainte Catherine qui met à disposition, pour cet accueil, « Le Chalet ».
Un article, sur leur site internet, en parle : https://www.servantesdemarie.com/fr/article/covid-urgence-protection-enfants-mission-accueil-servantes-de-marie

Comment vivez-vous cette période ? Qu'est-ce qui a changé pour vous ? 

Marie, Céline et Muriel, éducatrice au service Turquoise en télétravail :

« Depuis le début du confinement, les visites à domicile ont été suspendues. La majeure partie de l’équipe Turquoise, soit 8 éducateurs, est en renfort sur les groupes de vie en internat. De notre côté, nous sommes en télétravail avec pour mission de maintenir le lien avec les familles que le service accompagne. Ainsi, le service poursuit ses astreintes téléphoniques 24h/24 et 7j/7. Nous avons donc 75 enfants en suivi que nous nous sommes répartis à trois. Nous prenons des nouvelles de chaque enfant et, au maximum, tentons d’individualiser les suivis. Le nombre d’appels est en lien avec la dégradation des situations et le contexte actuel n’aide pas..  

De plus, l’essence même de notre travail : le travail auprès de l’humain, d’écoute et de soutien, « le faire avec » est complètement bousculé en travaillant à distance. Nous sommes passées, du jour au lendemain, au contact quotidien avec les familles à plus aucun contact en présentiel. Ceci a engendré des changements dans nos pratiques professionnelles et cela génère parfois de la frustration.

Heureusement, nous sommes très soudées et nous communiquons beaucoup. Chaque situation, même celles que nous ne suivons pas, est un problème pour tous. Notre mission est aussi de faire vivre le travail commencé par les collègues avec les familles. En effet, nous faisons vivre les référents habituels des situations auprès des familles : certaines demandent des nouvelles ou nous leur en transmettons spontanément. Un document de liaison existe afin de garder le contact avec le Chalet et les autres éducateurs du service. »